Hé, dites, oh !

« Désormais, quand il y a une grève en France personne ne s’en aperçoit. »
C’est par ces mots, en 2008, que Nicolas Sarkozy essuyait à nouveau du revers de sa Rollex dorée, le droit de grève et la liberté d’expression. Indifférence criarde de mauvais goût face à l’importance symbolique de ce droit de s’exprimer et d’exprimer son désaccord, au pays des « droits de l’homme ».
Ouille ! Les mots employés impactent les esprits, blessent et humilient peut-être certaines et certains d’entre nous.

Et par ce message ne pourrait-on pas entendre comme une provocation digne de la candide Marie-Antoinette, reine de peu de rien et de pas grand-chose, victime de sa condition : « Ils n’ont plus de pain ? Qu’ils mangent de la brioche ! »
C’est que le  « règne » de l’auteur de  « Désormais, quand il y a une grève en France personne ne s’en aperçoit »va malheureusement et sans aucun doute rester dans l’Histoire du pays.
En tant que président des décomplexés gonflés à bloc, il aura à plusieurs titres  démontré que l’on peut démanteler des valeurs et les rendre désuètes, entre autres par les mots et la communication.
Car c’est de cela qu’il s’agit. Du découragement et de l’humiliation d’une population par la dé- construction systématique de ses acquis sociaux et par l’image d’impuissance qu’il lui renvoi en choisissant méticuleusement les mots (pour ne pas) le dire.

Nos médias sont bien entendu ses premiers grands alliés, manitous de l’ensommeillement, régulateurs de pensées, dictateurs de la réalité pour la plupart.
Du story telling au marketing, les arts du récit en prennent un coup. Ce n’est pas un scoop, me direz-vous.
Mais l’art de communiquer en bandoulière, on essaie de nous faire avaler plus de couleuvres qu’on ne peut en avaler en un seul quinquennat.

Je me pose quand même une question en ces temps électoraux : Pourquoi les gouvernants des pays riches se pensent-ils comme les seuls autorisés à dessiner et raconter le monde ? De quel droit ?
L’humain se nourrit de mots, vecteurs de symboles très forts et ces mots assemblés forment des récits dont tout être doté de parole tend à se nourrir. J’irai même jusqu’à penser que le récit touche le cerveau reptilien chez l’être humain, tant il semble avoir de forces. Construire ces récits, y être sensible, s’y référer, est je pense vraiment constitutif de l’être humain.
Se « fixer » sur l’un d’entre eux pour définir son identité, l’histoire de sa propre vie est vraiment propre à l’être humain. Comment vivre sans  raconter, se raconter, ou du moins accrocher son propre filtre subjectif à la réalité ?
C’est bien cette fibre sensible que les médias et les communiquants cherchent à faire vibrer, en nous  servant des histoires et des images (au sens large) avilissantes, comme autant d’éléphants roses sensés détourner notre attention…

Comment savoir si une lutte vaut mieux qu’une autre ? Quelle réalité vaut plus qu’une autre ? Cela dépend par quel filtre on la regarde. Ou, je ne sais pas, regardons au moins par la lorgnette la plus humble qui soit si elle va dans le sens de la vie, du respect de celle-ci, du bien être le plus équitable.

Qui a t-il de plus important ? L’argent ? Ah oui, j’oubliais !